La RE2020 : vers des bâtiments à énergie positive

Prévue par la loi ELAN de 2018, la Réglementation Environnementale 2020 (RE2020), s’applique, avec quelques années de retard du fait de la crise sanitaire, depuis le 1er janvier 2022 et progressivement.

La RE2020 succède à la RT2012 (réglementation thermique 2012). Comme son nom l’indique, l’ambition est plus large : si la RT2012 avait pour objectif de limiter la consommation d’énergie primaire des bâtiments neufs, la RE2020 vise le contrôle du bilan carbone du secteur du bâtiment lequel est à l’origine de plus d’un quart des émissions du CO2 en France, et leur indépendance sur le plan thermique et environnemental. Les nouvelles constructions devront, à terme, produire plus d’énergie qu’elles n’en consomment.

  • Quelles constructions ?

La RE s’applique à tous les permis de construire ou déclaration préalable déposés (sauf dans les départements d’outre-mer)

 A compter du 1er janvier 2022 : pour les bâtiments ou de parties de bâtiments destinés à être habités (sont exclues les constructions ayant « donné lieu à la signature, avant le 1er octobre 2021, d’un contrat de louage d’ouvrage »et contrats de CMI

A compter du 1er juillet 2022 :  pour bâtiments de bureaux, d’enseignement primaire ou secondaire,

A compter du 1er janvier 2023 : pour les extensions de ces constructions et constructions provisoires

Sont exonérées jusqu’au 31 décembre 2022, les constructions de bâtiments d’une surface inférieure à 50 m² et les extensions de bâtiments d’une surface inférieure à 150 m².

Ne sont pas concernés, les PCM, et les projets de rénovation.

  • Objectifs : permettre d’atteindre la neutralité carbone en 2050

Diminuer l’impact carbone des bâtiments neufs sur son cycle de vie, dès la construction jusqu’à la démolition : en encourageant i) les modes constructifs qui émettent peu de gaz à effet de serre ou qui permettent d’en stocker tels que le recours aux matériaux biosourcés ii) la consommation de sources d’énergie décarbonées – notamment la chaleur renouvelable-.

Poursuivre l’amélioration de la performance énergétique et réduire les consommations d’énergie : renforcement de l’indicateur « de besoin bioclimatique » (dit « Bbio »).

Garantir aux habitants que leur logement sera adapté aux conditions climatiques futures : mieux prendre en compte le confort d’été.

  • Quelles exigences ?

Les exigences de performance énergétique et environnementale sont fixées par le décret n° 2021-1004 du 29 juillet 2021  https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043877196  

(nouveaux art. R. 172-1 et suivants du CCH). Ce sont des exigences de résultat :

La conception énergétique du bâtiment exprimé en points, noté en Bbio ═ évaluation des besoins de chaud, de froid, et d’éclairage

La limitation de consommation d’énergie primaire exprimée en kWh/ m2/ an (indicateurs Cep et Cep, nr pour le non renouvelable) ═ évaluation des consommations d’énergie renouvelable et non renouvelable du chauffage, refroidissement, eau chaude sanitaire, éclairage, ventilation/auxiliaires ainsi que l’éclairage/ventilation des parkings ; éclairage des circulations en collectif, électricité ascenseur/escalators

→ la limitation de l’impact sur le changement climatique associé aux consommations d’énergie primaire exprimé en kgCO2eq/ m2 SU/SHAB (indicateur Ic énergie) ═  introduction de la méthode d’analyse du cycle de vie pour cette évaluation d’impact pendant le fonctionnement du bâtiment, soit 50 ans.

→ la limitation de l’impact sur le changement climatique lié aux composants du bâtiment et chantier. L’indice global est exprimé en kgCO2eq/ m2 SU/SHAB (indicateur Ic construction) ═ généralisation de la méthode d’analyse du cycle de vie.

→ la limitation des situations d’inconfort dans le bâtiment en période estivale : Le nombre de degrés-heures d’inconfort estival, exprimé en° C. h (indicateur DH) ═ évaluation des écarts entre la température du bâtiment et la température de confort (entre 26 et 28°C)

L’annexe à l’article R. 172-4 du CCH détaille les valeurs des indicateurs mais seulement pour la maison individuelle ou accolée, et le logement collectif.

Un autre décret doit être pris pour déterminer les niveaux d’exigences qui s’imposeront pour le tertiaire de bureaux et les bâtiments éducatifs du primaire et du secondaire

  • Quels seuils, plafonds, et calculs pour chaque indicateur ?

Les valeurs minimales fixées sont vérifiées selon une méthode de calcul définie par arrêté (Art. R. 172-12 CCH).

C’est l’objet du premier arrêté du 4 août 2021 (1838 pages !) définit les seuils à respecter pour atteindre les exigences précitées, selon les catégories de bâtiments. https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf?id=LBxKOX3Duk3h0j_ck_WBwvf9HBYDu3aSYhPKEIm97w4=

  • Comment justifier de la prise en compte des exigences de la RE2020 ?

Les évaluations des constructions nouvelles soumises à la RE2020 seront formalisées par une étude de faisabilité et deux attestations : une en phase permis de construire et une en phase achèvement des travaux. La période d’étude de référence est de 50 ans pour tous les bâtiments (sauf provisoires).

Ces dispositifs réglementaires résultent du décret n° 2021-1548 du 30 novembre 2021  https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2021/11/30/2021-1548/jo/texte  et deux arrêtés publiés le 16 décembre 2021.

Pour accéder à l’espace de génération des attestations, flashez :

L’étude de faisabilité relative aux diverses solutions d’approvisionnement en énergie pour la construction d’un bâtiment soumis à la RE2020. https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044501492

• Quand ? préalablement au dépôt de la demande de permis de construire.

• Par qui ? le maitre d’ouvrage

• Objet : le maitre d’ouvrage i) choisit un système d’approvisionnement en énergie (« système pressenti ») ii) et réalise une étude de faisabilité technique et économique comparant le système pressenti au moins à quatre variantes couvrant les solutions d’approvisionnement en énergie prévues au 2° de l’article L. 122-1 du code de la construction et de l’habitation (CCH) (« notamment celles qui font appel aux énergies renouvelables, aux productions combinées de chaleur et d’énergie, aux systèmes de chauffage ou de refroidissement urbain ou collectif s’ils existent, aux pompes à chaleur performantes en termes d’efficacité énergétique ou aux chaudières à condensation gaz »).

L’attestation de réalisation de l’étude de faisabilité énergétique et de prise en compte de la RE2020 au dépôt du permis de construire https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044501420

• Quand ? à joindre au dossier de demande de permis de construire

• Par qui ? le maitre d’ouvrage.

• Objet :  l’arrêté définit le modèle de cette attestation et les modalités de sa production. Il doit être attesté :

De l’engagement du maître d’ouvrage à avoir réalisé l’étude de faisabilité ;

Du respect des seuils pour les indicateurs Bbio et degré heure ;

De l’engagement du maître d’ouvrage à pouvoir, avant le début des travaux, justifier du respect des seuils pour les indicateurs Ic énergie et Ic construction, c’est-à-dire d’avoir réalisé une analyse de cycle de vie du bâtiment conforme aux exigences de la RE2020 ;

De l’exigence d’accès à l’éclairage naturel ;

D’un engagement du maître d’ouvrage à prendre en compte les exigences sur les systèmes de ventilation.

L’attestation de prise en compte de la RE2020 à l’achèvement des travaux https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044501420

• Quand ? L’attestation est jointe à la déclaration attestation l’achèvement et la conformité des travaux.

• Par qui ? Attestation réalisée pour le compte du maitre d’ouvrage par une personne visée à l’article R122-25 du CCH (architecte, contrôleur technique, organisme de certification..).

• Quoi ? il est attesté :

Du respect de l’ensemble des indicateurs relatifs aux exigences de résultat de la RE2020 ;

De certaines exigences sur les caractéristiques thermiques du bâtiment (par exemple, sur l’isolation) ;

Pour les bâtiments résidentiels, des exigences vis-à-vis de la perméabilité à l’air et du système de ventilation ;

Un contrôle de cohérence de 10 données environnementales utilisées dans l’analyse de cycle de vie du bâtiment est également intégré à cette attestation.

En cas de pluralités de bâtiments, les niveaux d’exigences doivent être respectés pour chaque bâtiment individuellement.

Un label réglementaire sur la performance énergétique et environnementale devrait aussi entrer en vigueur le 31 décembre 2022, au plus tard.

  • Sanctions

Ces nouvelles performances engagent tous les professionnels du bâtiment, du maître d’ouvrage au bureau de contrôle.

C’est le maître d’ouvrage qui est débiteur de l’obligation d’établir en version informatique, à partir d’un logiciel respectant les exigences fixées à l’arrêté du 4 août 2021 (article 12), au plus tard à l’achèvement des travaux, un récapitulatif standardisé d’étude énergétique et environnementale.

Les données transmises pour le calcul des valeurs sont conservées par le maître d’ouvrage, après l’achèvement des travaux et pendant au moins six ans à compter du dépôt de la déclaration d’achèvement des travaux (Article R172-8 CCH), pour être transmise aux acquéreurs dans la limite de cette durée de conservation, aux autorités de contrôles des règles de construction et à toute personne devant établir un DPE.

Le régime du contrôle et de sanction de ces nouvelles obligations résultant de la RE2020 régies par le contrôle des règles de construction (CRC) qui fait l’objet depuis le 1er juillet 2021 d’un nouveau Titre VIII au CCH (articles L181-1 et suivants du CCH) prévoit des : sanctions pénales, civiles, administratives.

Sanctions administratives :

  • Le maître d’ouvrage qui n’a pas répondu à la mise en demeure de l’autorité administrative compétente de lui communiquer les informations et documents peut se voir appliquer une amende de 1.500 €. Il peut aussi être obligé à satisfaire cette obligation sous astreinte journalière au plus égale à 150 €.
  • L’interruption des travaux en cours peut être ordonnée.

Sanction pénale :

45.000 € d’amende pour tous utilisateurs du sol, bénéficiaires des travaux, entrepreneurs ou toute autre personne responsable de travaux qui ne respecteraient pas ces obligations (l’amende pouvant être portée au quintuple pour les personnes morales – article 131-38 du code pénal). Peine d’emprisonnement prévue en cas de récidive.

Sanction civile :

Les responsabilités décennales des constructeurs au sens des articles 1792 et suivants du code civil seront engagées dès lors que les performances ne seront pas atteintes.

Toutefois cette possibilité sera limitée à la démonstration de l’impropriété à destination qui est elle-même conditionnée à une « surconsommation énergétique ne permettant l’utilisation de l’ouvrage qu’à un coût exorbitant », sous réserve que les conditions d’usage et d’entretien de l’ouvrage soient jugées appropriés (article L 123-2 du CCH).

Se posera également la question du devoir de conseil dorénavant plus étendue. Les calculs pour permettre d’atteindre les objectifs fixés sont réalisés à la conception, des modifications ultérieures au projet initial pourraient entraîner des écarts qui ne permettraient plus d’atteindre les performances énergétiques fixées.